Dans la fameuse chanson de Boris Vian, datant de 1954, «le déserteur» écrit au Président pour ne pas aller à la guerre. Au lycée Michelet de Montauban, c’est pour une autre raison qu’un groupe d’élèves a posté jeudi dernier une lettre à François Hollande : ajout d’un nouveau mot dans le dictionnaire. Chocolatine. Un mot gourmand, chantant, qui dit les matins pressés et les goûters affamés dans le Sud-Ouest de la France. Partout ailleurs, de Lille à Marseille en passant par Meaux, on dit pain au chocolat. Et on la paie comme partout environ 1€, fourrée de 2 barettes fondantes.
«Nous sommes des sudistes!»
Dans leur lettre au Président que nous reproduisons ci-dessous, Héloïse, Manon, Vincent et trois autres élèves de 1re S déplorent que la chocolatine «ne se trouve pas dans certains dictionnaires» et espèrent le convaincre du bien-fondé de leur requête, sachant qu’elle «peut paraître dérisoire face aux autres problèmes auxquels vous êtes confrontés…»
«D’abord, ce n’est pas du pain, c’est du feuilleté!»…Rencontrés à la sortie du lycée à l’heure de la chocolatine, ces jeunes demandeurs argumentent : «C’est un mot de notre région, qui regroupe beaucoup de monde, il n’y a pas de raison que le reste du pays ne le connaisse pas. Nous sommes des sudistes, on en est fier!», dit Manon. Héloïse, qui a rédigé la missive, enchaîne : «j’ai vu dans le Larousse tchouler, un mot qui vient de Belgique, alors pourquoi pas chocolatine puisqu’on l’emploie jusqu’au Québec?».
«Oui, ça fait un peu partie de notrevie», confirme Vincent, le fort en math qui a rejoint le groupe des militantes de la choco qui compte aussi Emma et Limsey.
Donc, une fois le sujet bien mastiqué, Héloïse a cherché des arguments, qu’elle a trouvés dans l’origine autrichienne des viennoiseries : le «shokolode croissant», aisément transformable en «chocolatine» une fois qu’il a perdu sa forme de croissant.
«On ne veut pas changer la façon de parler de tous les Français, mais juste qu’on reconnaisse la nôtre,surtout qu’elle nous paraît plus juste», résume-t-elle.
Héloïse avait noté ces arguments sur une feuille de classeur et c’est après les vacances de Noël, alors que le sujet était digéré depuis des semaines, qu’elle a décidé le groupe à lui donner une suite : l’envoyer au Président. «Mais on devrait aussi l’adresser à l’Académie française, c’est là qu’on fait le dictionnaire», a-t-elle proposé vendredi. Manon : «Mais on n’a pas fait de photocopie!»