La concurrence entre ces deux termes règne. D’où vient donc cette rivalité et y a-t-il vraiment un gagnant ? Savez-vous vraiment ce que vous mangez ? On vous dit tout.
Dimanche matin, le jour se lève, les rayons du soleil s’installent dans votre chambre. Vous émergez lentement d’une longue nuit de sommeil. Soudain, une odeur de beurre chaud vient vous taquiner les narines! Sous votre fenêtre, une boulangerie. Dans celle-ci, il y a des viennoiseries par centaines. Des croissants, des chouquettes, des madeleines, des brioches. Et bien sûr, des pains au chocolat! Ou bien, devrait-on dire, des chocolatines? Telle est la question.
D’où vient donc cette rixe culinaire? Pour bien comprendre les tenants et les aboutissants, il s’agit d’abord de savoir ce qu’est un pain au chocolat / une chocolatine… C’est une viennoiserie composée de pâte levée feuilletée, de forme rectangulaire et peu ou prou fourrée de chocolat. Son prix? Certainement pas «aux alentours de 10 ou 15 centimes», comme l’affirmait Jean-François Copé sur le plateau d’Europe 1 en octobre dernier. Il faudra plutôt débourser autour d’un euro pour obtenir cette petite gourmandise.
Entrons à présent dans le vif du sujet. La différence linguistique est tout d’abord géographique. En effet, les chocolatines sont légion dans le Sud-Ouest – et au Québec – tandis que dans le reste de l’Hexagone, le pain au chocolat est roi. Pourtant, à l’origine, cette viennoiserie n’est pas une spécialité française. En France, le terme «pain au chocolat» fut employé pour la première fois au dix-neuvième siècle. Il désignait des pâtisseries d’inspiration viennoise.
Une boulangerie viennoise à l’origine
Dans les années 1830, au 92 rue de Richelieu à Paris, la première «Boulangerie Viennoise» française voit le jour. Celle-ci était tenue par l’Autrichien Auguste Zang, comme l’atteste Jim Chevallier, historien culinaire, dans son ouvrage August Zang and the French Croissant: How Viennoiserie Came to France. Dans son échoppe, le «schokoladencroissant» désignait un croissant fourré au chocolat. À l’origine, le terme «chocolatine» proviendrait donc de ce lieu. Les Français, entendant «schokoladen», auraient petit à petit adapté et harmonisé l’appellation à leur propre idiome, pour aboutir au mot «chocolatine».
Au début du vingtième siècle, les pâtissiers français ont repris et réinventé ces viennoiseries à leur manière. Le terme «chocolatine» s’est alors peu à peu évanoui, pour ne subsister que dans l’incorruptible Sud-Ouest, en raison notamment du parler occitan gascon. «Chocolatina» – signifiant «chocolatine» en français méridional – s’est construit autour du mot «chocolat», avec l’ajout d’un suffixe gascon diminutif et affectif en -IN(E) signifiant «petit, doux».
La chocolatine victorieuse!
Le terme «chocolatine» semble aussi être privilégié à l’étranger. Dans Chocolat, mots & gestes, ouvrage coécrit avec Alain Ducasse et publié aux éditions Ducasse, Nicolas Berger note que le terme «pain au chocolat» désignait au départ un simple bout de pain dans lequel on fourrait une barre de chocolat, pour le goûter des écoliers. En effet, techniquement parlant, cette viennoiserie est faite de pâte levée feuilletée comme le croissant, et non de pâte à pain au lait ou à brioche comme le sont par exemple le pain viennois ou le pain au lait.
Par conséquent, le gagnant est la chocolatine! Le pain au chocolat, bien qu’usité par le plus grand nombre, n’est pas le terme adéquat pour désigner cette chère viennoiserie. Au-delà des mots, tout le monde – ou presque – s’accordera à dire que, pain au chocolat ou chocolatine, le plaisir en bouche vaut tous les mots du monde!
Source : www.lefigaro.fr